« Oui, l’art est un milieu élitiste mais il y a tellement d’opportunités de business » – Elisabeth Mouchy, Daylighted

« Oui, l’art est un milieu élitiste mais il y a tellement d’opportunités de business » – Elisabeth Mouchy, Daylighted

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Pour ce vendredi, Loic Le Meur, fondateur de LEADE.RS et rédac’ chef éphémère de Widoobiz a choisi de parler d’art à travers la startup Daylighted. Pour la fondatrice Elisabeth Mouchy, l’art doit connaître sa transformation digitale. 

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Widoobiz : Pourquoi avoir eu envie de lancer une startup dans ce domaine ?

Elisabeth Mouchy : Daylighted est né de notre frustration quant au monde de l’art. Contrairement à d’autres milieux comme la musique ou le cinéma qui ont déjà connu leur transformation digitale, avec des services comme Spotify ou Netflix, l’art est aujourd’hui toujours restreint aux galeries et aux musées.

Avec Alex Cammarano, mon associé, nous pensons que l’art a besoin de connaître sa propre transformation digitale afin de pouvoir devenir accessible à tous. On a donc posé nos bagages à San Francisco pour créer SmArtGallery, un tableau d’art connecté qui affiche des collections d’artistes locaux, de galeries, ou de musées à la demande

W : On dit souvent que l’art c’est un peu élitiste, que répondez-vous à cela ?

E.M : Je réponds que c’est vrai, il ne faut pas être langue de bois ! Si on remonte quelques siècles en arrière, l’art a pendant très longtemps été réservé aux élites. Quand on voit le prix des oeuvres, les process de vente, l’austérité de certaines galeries, la manque d’information et de contexte dans les musées, on constate que c’est un système qui est tourné vers les collectionneurs et les connaisseurs et très peu tourné vers le reste de la population.

Il y a bien sûr eu, avec l’avénement d’Internet, des sites de vente en ligne d’art qui se sont développés, comme Art.com ou curioos.com qui proposent des oeuvres magnifiques et abordables. Mais, en termes de découverte, tout est encore concentré autour des vernissages ou expositions dans des lieux très select. C’est un milieu élitiste, mais il y a tellement d’opportunités de business…

W : C’est un créneau intéressant pour faire du business ?

E.M : Bien sûr ! Je pense qu’il y a encore peu de business innovants dans ce secteur et pourtant tellement de choses à lancer !
Si on compare l’art à la musique, nous en sommes aujourd’hui à l’équivalent du lancement de l’iPod et l’Itunes pour l’art, donc presque 20 ans de retard ! Le domaine de l’art est encore vraiment neutre en termes de nouveaux business.

W : Pourtant, l’art commence petit à petit à se digitaliser, non ?

E.M : C’est vrai, surtout en termes de contenu. Les artistes adorent ce nouveau médium.  On voit de nouveaux formats émergés : videos gifs, cinemagram, chrono art, etc. Mais aujourd’hui, il n’y a aucun moyen d’afficher ces oeuvres chez soi. C’est un créneau sur lequel nous voulons aussi nous positionner.

W : Vous avez repéré beaucoup de startups qui jouent dans la même catégorie que vous  ?

E.M : Pas tant que ça non ! C’est un avantage considérable pour nous, notamment quand on rencontre des investisseurs intéressés par l’art. C’est aussi un avantage dans le recrutement. Il y a tellement de talents passionnés par l’art, mais si peu de projets vraiment innovants, que quand nous ouvrons un poste nous avons souvent de très bons candidats qui y postulent.

Les jeunes, les millennials, et même les nouveaux riches, surtout issus de la Tech, ne se retrouvent pas dans ces codes. Heureusement, aujourd’hui, tout se démocratise grâce à Internet et l’exposition d’art est en train de connaître une mutation à son tour.

W : Aujourd’hui, vous en êtes où ?

E.M : Nous avons aujourd’hui plus de 60 SmArtGalleries installées à travers le monde, à San Francisco bien sûr mais aussi à Los Angeles, San Diego, New York ou à Paris, dans des groupes comme Accor, Hyatt, Destination Hotels, etc. Nous nous étendons aujourd’hui à d’autres verticaux comme les médecins, les bars, les hôpitaux, les lounges d’aéroports…

Nous venons également de terminer le programme The Refiners (ndlr : programme d’accélération à San Francisco lancé par Géraldine Le Meur, Carlos Diaz et Pierre Gaubil). On est en train de lever 2 millions de dollars.

W : Tout semble aller pour le mieux pour vous, ça a toujours été le cas

E.M : Bien sûr que non. Nous avons fait une erreur majeure au début de notre lancement en voulant être trop ambitieux. On a  voulu aller très vite, «à l’américaine ». On s’était fixé un budget trop faible pour des objectifs de réussite trop ambitieux. C’était bien sûr sans avoir une vraie connaissance de notre marché.

Suite à cet échec, on a pris un peu plus de notre temps pour développer la partie commerciale et surtout, nous nous sommes rendus compte de la saisonnalité du business. Les clients sont donc tous arrivés juste après cette étape difficile, ce qui nous a permis de repartir sur une base saine, de reconstruire une équipe, et retrouver un momentum.

W : Prendre son temps, c’est ça le conseil que vous donneriez aux entrepreneurs pour réussir ?

E.M : Je pense que pour réussir, il faut échouer. Les artistes connaissent bien ça d’ailleurs. Pour une personne qui achète une oeuvre, il y en a peut-être 100 qui l’ont refusée, critiquée. On a trop d’exemples de réussite autour de nous, surtout dans le monde startup et dans un monde de réseaux sociaux où tout brille. Monter une société peut sembler de plus en plus facile, et sous un certain angle, ça l’est.

Beaucoup de personnes n’osent toujours pas se lancer, surtout en France, par peur de l’échec. Mais l’échec est en fait une étape indispensable sur le chemin du succès et qui peut par ailleurs se maîtriser. La seule vraie erreur serait de pas essayer du tout et de ne rien apprendre. Mon conseil serait donc d’essayer d’échouer le plus possible et le plus rapidement possible.

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