Entrepreneur : comment la paternité a changé leur philosophie de business

Entrepreneur : comment la paternité a changé leur philosophie de business

Publié le 19 janvier 2017

La vie de startupper est souvent faite d’épreuves parallèles, comme la paternité. Un défi qui impacte forcément sa philosophie de business.

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Une vraie révolution. Dans la vie de tout homme, l’arrivée du premier enfant est un chamboulement profond. Les priorités changent, le temps se réduit, la fatigue grandit. Que dire alors pour les entrepreneurs qui se dévouent corps et âme à leurs projets. Au lieu de l’imaginer, nous avons préféré leur poser directement la question.

Arnaud Touati – Alto Avocats : « finis vite ton travail pour retrouver ton fils dès que possible »

La paternité a radicalement changé la vision que j’avais de mon emploi du temps. Je me suis astreint des horaires très stricts pour pouvoir profiter de mon fils le matin et le soir. Et j’évite au maximum de travailler le week-end, ce qui, pour l’avocat que je suis, est très compliqué.
Maintenant, je délègue davantage de tâches à mes collaborateurs. J’ai gagné en efficacité. C’est comme si mon inconscient me disait : « finis vite ton travail pour retrouver ton fils dès que possible ».
Je ne sais pas si cela m’a rendu meilleur, mais ma paternité m’a permis de prendre davantage de distance sur mes enjeux professionnels. Je crois avoir gagné en hauteur de vue sur les dossiers. Enfin, le soir je ne rumine plus les difficultés de ma journée. Je préfère profiter de ma vie de famille. C’est tellement plus sain.

Christian de Turckheim – My Divorce : «  plus patriarcale dans ma manière de gérer au quotidien mon entreprise »

Dès le départ, j’ai dû m’adapter. D’autant plus que je suis le papa divorcé de 3 enfants en bas âge en garde alternée. Comme je suis entrepreneur, j’ai pu adapter mon emploi du temps en fonction des semaines avec ou sans mes enfants. Quand je ne suis pas avec eux, mes semaines sont uniquement consacrées à mon entreprise et à mes clients. J’essaie de « rattraper » mes heures des semaines raccourcies lorsque j’en ai la garde.
Du coup, je suis devenu plus patriarcale dans ma manière de gérer au quotidien mon entreprise. Mais, avec l’éducation que j’inculque à mes enfants, j’ai aussi appris à prendre plus de recul, à mieux écouter et à m’adapter auprès de mes collaborateurs. Chacun évolue à son rythme. J’essaie de poser des objectifs individuels et collectifs. Je veux être au centre de mes collaborateurs et leur donner à tous une envie de réussir. Je veux qu’ils soient épanouis dans leur vie professionnelle.

David Even – Arrondiss’Presse : « Le sens du sacrifice est différent avec un enfant »

Avec un enfant, j’ai été obligé d’aller à l’essentiel et de mieux m’organiser. Aujourd’hui, je pars moins dans tous les sens. Je me suis structuré afin de ne jamais arriver en retard à la crèche. De manière générale je coupe aussi davantage avec le travail. Je bosse moins le soir et les week-ends. Ce qui, au final, n’est pas plus mal quand on recherche l’efficacité.
Dans l’entreprise, beaucoup d’enfants sont arrivés en quelques années. Ça nous permet d’être tous un peu raccords sur le sujet. Surtout, on comprend mieux les problématiques personnelles des collaborateurs. Il est probable également que ma qualité d’écoute ait progressé avec l’arrivée de l’enfant.
Je ne sais pas si je suis devenu meilleur. En revanche, je ne suis plus le même. Le sens du sacrifice est différent avec un enfant. Avant, le boulot prenait une place centrale. Aujourd’hui, c’est l’enfant qui le devient.

Mathieu Benayoun – MB&Scott : « la paternité m’a aidé à mettre de côté mes idées farfelues »

La paternité… vaste question. Disons qu’avec l’arrivée de mon enfant, ma vie d’entrepreneur s’est recentrée sur l’essentiel : le travail d’une part et la famille de l’autre. On apprend à niveler et à prioriser ce qu’on fait, car le temps qu’on n’a plus est cher. Je me suis aussi recentré sur l’humain. J’ai appris que la seule performance n’a pas de sens.
Maintenant, on apprend à recentrer le travail sur les compétences de chacun. Je me suis beaucoup documenté sur l’holacratie comme méthode de management. Je pense d’ailleurs que tout le monde l’a senti dans l’entreprise. Aujourd’hui, on arrive à faire échanger des métiers complètement différents lors des meetings. Cela nous a apporté une ouverture d’esprit insoupçonnée. Tout le monde se sent investi à la cause commune.
Au final, la paternité m’a aidé à mettre de côté mes idées farfelues pour me recentrer sur ce qui est viable et simple. Ce qu’on apprend pendant nos études sur l’agilité est vrai. Apprendre à faire simple en premier, en laissant les rêves pour devenir des objectifs.

Armand Thiberge – SendinBlue : « la paternité m’a fait comprendre que notre société est très hiérarchique et parfois infantilisante »

Concrètement, en devenant papa, j’ai dû apprendre à travailler autant, mais en moins de temps. Cela veut dire, bien s’entourer et déléguer plus. C’est à cette époque que notre CTO est arrivé en temps qu’associé et qu’un CFO nous a rejoint. Évidemment, on ne peut plus aller boire des bières le soir après le boulot. On ne peut plus non plus passer des heures à étudier le produit et faire des retours aux développeurs comme je le faisais avant.
Sur le management, mon expérience est singulière. La paternité renvoie à l’autorité, et à ce que je peux représenter pour un nouvel arrivant sur cette planète. Paradoxalement, la paternité m’a fait comprendre que notre société est très hiérarchique et parfois infantilisante. J’essaie aujourd’hui d’appliquer le concept de l’entreprise libérée à SendinBlue.
Je laisse un maximum les salariés prendre des initiatives. Je me considère désormais plus comme un coach que comme un chef. Les salariés sont des adultes responsables. Il faut donc les considérer comme tel et leur donner les moyens de s’épanouir dans leur vie professionnelle. Quand j’y pense, être papa m’a rendu meilleur dans mon métier d’entrepreneur.
Mais la vraie révolution est ailleurs. Avoir des enfants signifie que, maintenant, il y a quelque chose de plus important que la réussite de ma startup. Cela permet de relativiser la peur de l’échec, très importante chez l’entrepreneur, même s’il peut prétendre le contraire.

Baptiste Caspar – JAIMEMONARTISAN.COM : « le parallèle entre mon rôle de père et de manager est évident »

Deux ans après le lancement de ma société, notre fils Gabin est né. C’était clairement un nouveau défi à relever pour le jeune entrepreneur que j’étais. À ce moment, je travaille encore chez moi. Je m’occupe de mon fils à temps partiel. Aujourd’hui, les choses roulent et nos agendas partagés (merci Google) nous permettent de connaitre les contraintes professionnelles de chacun.
Le parallèle entre mon rôle de père et de manager est évident. Pour Gabin, je veux le laisser libre d’apprendre, de découvrir et d’expérimenter par lui-même. Dans la startup, l’innovation nous permet un management plus participatif centré sur l’implication des collaborateurs et la relation humaine qui nous lie.
Est-ce que cela m’a rendu meilleur ? Einstein disait : « nous aurons le destin que nous aurons mérité ». J’évite maintenant d’essayer de savoir si j’ai raison ou tort, si je suis meilleur ou mauvais. Je me bats tous les jours pour atteindre l’objectif professionnel et familial fixé. Je tente juste de donner du sens à chacune de mes actions.

Vianney Vaute – Back Market : « Je me projette sur des temps plus longs »

J’ai eu mon premier enfant deux semaines avant le lancement de Back Market. Je vis alors la paternité plutôt comme une sorte de parallèle qui opère souvent comme un miroir de l’entreprise. Je trouve qu’il y a pas mal de points communs dans le développement de ma fille et celui de la startup.
D’ailleurs, je découvre mon métier de manager en même temps que celui de père. J’apprends sur le terrain. Et, je dois probablement faire un nombre incalculable d’erreurs. Quant à l’influence de la paternité sur mon mode de travail, elle concerne sans doute les week-ends : je préfère filer aux Buttes-Chaumont qu’ouvrir mes emails.
Ça bouscule logiquement le sens des priorités. Le destin de Back Market passe peut-être un peu en second plan, comparé à celui de ma progéniture. Mais je suis convaincu que c’est plutôt un glissement positif. Je relativise les contrariétés du quotidien de la startup. Je me projette sur des temps plus longs.
C’est peut-être ça d’ailleurs l’équation de la réussite : scrum + kids.

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