Abbé Pierre : de l’appel à «la bonté» à la multinationale « Emmaüs »

Abbé Pierre : de l’appel à «la bonté» à la multinationale « Emmaüs »

Publié le 3 février 2014

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60 après son appel resté célèbre, l’Abbé Pierre reste une des personnalités préférées des Français. Et si les entrepreneurs s’en inspiraient ?
« Mes amis, au secours… une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l’avait expulsé… ». En prenant la parole le 1er février 1954 sur les ondes de Radio-Luxembourg, l’Abbé Pierre est entré dans le cœur des Français pour ne plus jamais en sortir. Retour sur un homme qui a dédié sa vie à la construction d’une idée plus haute que lui-même.

« Il ne faut pas attendre d’être parfait pour commencer quelque chose de bien »

Originaire de Lyon, Henri Grouès est issu de la bourgeoisie. Très tôt, il montre un intérêt pour toutes les choses de la foi. À 17 ans demi, il décide d’entrer dans les ordres franciscains. Ordonné prêtre en 1938, il intègre néanmoins l’armée pendant la « drôle de guerre ». Après la défaite, il devient chef d’un réseau de résistant où il se donnera le nom d’Abbé pierre. Lors de cette période noire, il aidera de nombreux enfants juifs et aussi des réfractaires au STO. Autant d’actes de bravoure qui lui permettent d’obtenir la Croix de Guerre.
La paix revenue, l’Abbé Pierre veut s’engager en politique pour construire une société plus juste. Il s’engage au MRP, avant de rejoindre les Chrétiens socialistes. Mais l’action politique ne s’accorde pas avec sa personnalité bouillante. À la fin de son mandat de député en 1951, il quitte la politique pour retourner à son premier amour : l’église. L’Abbé Pierre semble définitivement quitter la vie publique. C’était sans compter l’hiver 1954.

 « On ne peut pas, sous prétexte qu’il est impossible de tout faire en un jour, ne rien faire du tout »

Ce qui restera sous le nom d’ « Appel de l’Abbé Pierre » va rapporter 500 millions de francs de dons. Une somme gigantesque dont il ne sait que faire au début. Le volume de dons en nature est si immense qu’il faut plusieurs semaines à la radio Luxembourg, puis aux collègues de l’Abbé Pierre pour les trier et les stocker convenablement. Que faire, comment ? L’Abbé Pierre ne se pose pas trop de questions. Cet argent va servir à la construction de Cité d’urgence, forme de bidonville à Noisy-le-Grand.
D’un appel spontané, l’Abbé Pierre va devoir penser à une organisation. En cela, l’Abbé Pierre a été un entrepreneur efficace. À partir de l’association Emmaüs, fondé le 23 mars 1954, il va fédérer les communautés de bénévoles qui se proposent de construire des logements pour sans-abri. Des compagnons issus de classe sociale très différente. Aucun problème pour l’Abbé Pierre, comme il dit souvent « l’amitié, c’est ce qui vient au cœur quand on fait des choses ensemble des choses belles et difficiles ».

« Le pouvoir est fait, non pour servir le pouvoir des heureux, mais pour la délivrance de ceux qui souffrent injustement »

Très vite, l’association grandit pour aller aider les plus démunis dans le monde entier. À la suite d’un naufrage où il a failli perdre la vie, il crée Emmaüs International, de peur que le mouvement s’évanouisse au cas où il disparaîtrait. À la manière d’un patron de PME en passe de devenir une ETI, il comprend que l’entreprise ne peut plus reposer sur sa seule image. La structure, la procédure prend le pas la spontanéité.
Pour entretenir cet élan du coeur, l’Abbé Pierre multiplie les voyages et les interventions publiques. Il n’hésite pas non plus à démarrer de nouveaux projets caritatifs. Il crée la Fondation Abbé Pierre en 1988 pour lutter, toujours, contre le mal-logement. Au final, l’Abbé Pierre a toujours été un entrepreneur pour défendre la cause des plus pauvres.

 Tancrède Blondé

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