Financement externe, la clé de votre croissance

Financement externe, la clé de votre croissance

Chefs d’entreprises, experts comptables, banquiers, représentants de réseaux d’accompagnement sont unanimes : pour asseoir sa croissance, il faut oser emprunter ! Sur le Salon des Entrepreneurs de Marseille, ils nous ont donné les clés du financement externe.

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« Chaque fois, un banquier va vous parler de lui, de ses produits. Là, il s’agit de parler de vous. » Agnès Bricard, première femme à tenir la présidence du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables, donne le ton en ouvrant de bal de la conférence organisée par la Caisse d’Epargne sur le Salon des Entrepreneurs de Marseille le 9 octobre 2018. Également commissaire aux comptes, cette dernière s’est penchée sur les possibilités de financer son projet et la croissance de sa société lorsqu’on est entrepreneur.e.s avec d’autres acteurs de l’écosystème entrepreneurial. À ses côtés, Stéphane Alessandroni, directeur du développement des marchés de l’économie régionale à la Caisse d’Epargne CEPAC, délivre son premier conseil : « il faut venir voir très très tôt un banquier. Si le fléchage est trop compliqué, la banque est un guichet où on peut commencer à discuter. J’incite aussi les entrepreneurs à se rapprocher de grands réseaux d’entreprises. »

Fonds publics et concours, l’effet levier pour le financement bancaire

Pas toujours facile en effet de s’y retrouver lorsqu’on veut chercher des fonds au-delà de ses propres deniers. Les acteurs de la table ronde décortiquent ainsi les caractéristiques des soutiens des réseaux d’accompagnement, puis des banques. « Toutes les aides publiques sont très importantes », souligne Agnès Bricard. D’autant qu’elles permettent souvent de solliciter les fonds privés dans un second temps. « Il faut commencer dans le bon sens, conseille l’experte. D’abord aller vers les prêts d’honneur (des prêts sans intérêts ni garanties, ndlr) et les nombreux concours créateurs, avant les banquiers. Surtout que ces derniers sont souvent présents dans les jurys des concours en question. »

Jean-Charles Clerc, directeur de France Active PACA, confirme l’importance des réseaux d’accompagnement : « Dans un environnement qui présente des freins pour la création d’entreprise, France Active propose des prêts, notamment des prêts d’honneur et des garanties, à celles et ceux qui peuvent avoir un impact positif sur un territoire via des pratiques plus responsables et plus durables. »

Autre bon point : les choses peuvent se faire très vite maintenant. Les concours recensés par le site Internet de l’AFE peuvent souvent se faire en ligne en quelques clics. Il faut aussi « moins de 48h pour obtenir sa garantie aujourd’hui avec Bpifrance », précise Agnès Bricard.

Choisir son réseau avec soin

Autant d’initiatives qui constituent un signe de confiance et de crédibilité pour obtenir un financement bancaire. Aurore Sun, à la tête de Spark Relations Publics et Mysunnybrand, en est un exemple vivant : « Pour la création de mon entreprise, j’avais identifié un nouveau marché et forte de mes différents mandats philanthropiques, je me suis dit ‘pourquoi ne pas faire comme tous mes copains ?’ J’ai donc contracté un petit prêt (le Nacre, nouvel accompagnement à la création ou la reprise d’entreprise) qui a fait effet de levier auprès de la CEPAC. (…) Tous ces réseaux ne sont pas concurrents, mais bien complémentaires. »

Cela peut surprendre, mais « les grands groupes se mobilisent pour vous ! », renchérit Agnès Bricard. En effet, de nombreuses entreprises prêtent des sommes parfois très conséquentes à des porteurs de projet et des chefs d’entreprise. Encore faut-il trouver l’information, soulignent les intervenants. Des informations justement regroupées par la Caisse d’Epargne dans un livre très complet et gratuit : Le Guide du Routard du financement d’entreprise. Surtout que toutes ces aides ne sont pas nécessairement cumulatives. On doit choisir son réseau.

Des alternatives aux banques ? C’est possible, mais ça peut coûter (plus) cher

Autres options évoquées par les experts : le love money, soit les capitaux apportés par les proches (famille et amis), ainsi que le crowdfunding. Ce dernier reste en effet un recours. En atteste l’exemple pris par Agnès Bricard du grand chef Alain Ducasse.« Il souhaitait s’installer sous La Canopée des Halles à Paris. Pour finaliser son implantation, il lui manquait 400 000 euros. Or le pool bancaire a décidé de ne pas faire de rallonge. Il est allé sur une plateforme de crowdfunding. C’est LE Moyen de sortir par le haut quand on a tout essayé, notamment le tour de table avec les banquiers. »

Une fois le cap des premières années dépassé, le financement externe est toujours à valoriser. Pour savoir combien demander et vers qui aller, Stéphane Alessandroni préconise de « travailler en prospectif sur sa trésorerie dont le financement peut paraître un peu ésotérique. (…) Il faut catégoriser ses différents types de besoins. Bien gérer le poste client est un argument solide face aux banques. » Il faut aussi penser à financer les décalages de paiement et le besoin de fonds de roulement. Aurore Sun est elle aussi catégorique : « La trésorerie c’est le nerf de la guerre. »

À toutes les options déjà évoquées, peut s’ajouter le recours aux fonds d’investissement. Avec un préalable toutefois, selon Agnès Bricard : celui de « faire expertiser sa boîte par un expert-comptable, autrement dit de demander à un évaluateur la valeur immatérielle de sa société, son goodwill, sa survaleur. » Mais attention, tout comme les taux du crowdfunding, ceux des fonds peuvent aussi être plus conséquents que ceux des banques, avec des emprunts obligataires de l’ordre de 5% par exemple.

Halte aux clichés. Osons emprunter !

Les acteurs de la table ronde n’hésitent pas à revenir sur certains clichés. Un point sur lequel a insisté Stéphane Alessandroni est celui de « lever les barrières et les tabous sur ce qu’on appelle les fonds propres. Dès lors qu’on a des financements assimilables à des fonds propres (prêt d’honneur, love money, crowdfunding par exemple), on peut se dire ‘ce sont les fonds que je possède’. » Exit la culpabilité !

Autre poncif soulevé par la chef d’entreprise et présidente de Femmes Chefs d’Entreprises Marseille, Aurore Sun : « un ami me disait ‘à quoi bon aller voir les banques, j’ai de l’argent’. Eh bien, justement, c’est le moment d’emprunter ! » L’entrepreneure, qui n’a jamais pensé à emprunter lors de la création de sa première compagnie il y a sept ans, reconnaît pourtant la nécessité de le faire. « Il faut se dire que ‘ces petits sous’ font effet de levier pour les gros sous qui viennent après. Parfois, on renonce à toute tentative, surtout qu’on a mille autres choses à faire. On se dit à tort que tout ce temps passé pour chercher des subventions, on le perd pour le développement commercial. C’est une erreur, car ça permet de se développer et de pouvoir embaucher notamment. »

Les femmes, des entrepreneures encore minoritaires en France

Pourtant, hommes et femmes qui entreprennent ne semblent pas le faire sur un pied d’égalité. Aurore Sun d’ajouter : « On a noté que les femmes osent moins demander. Et quand homme et femme demandent autant, les hommes se voient prêter plus. » Valérie Segretain, CEO de Customer Labs, abonde en ce sens : « Hélas, c’est statistique. À équivalence de présentation de dossiers, il y en a deux fois plus de financés pour les hommes. »

Autres données, seules 30% des sociétés nouvellement créées le sont par les femmes. Un pourcentage qui ne dépasse pas les 15% en cas de reprise d’entreprises. Reconnaissant l’enjeu sociétal et national de l’entrepreneuriat au féminin, la CEPAC s’est associée à un programme hexagonal qui a pour vocation de faire passer les femmes créatrices d’entreprise de 30 à 40%, précise Stéphane Alessandroni. D’ailleurs, sur les questionnements liés à l’emprunt, la Caisse d’Epargne semble avoir pris les devants : « Notre enquête sur les jeunes entrepreneurs qui nous ont fait une demande de crédits, a révélé que nous avons accordé plus de dossiers à des demandeuses qu’à des demandeurs. Tout ça, ce sont des barrières qu’il faut lever. À notre niveau, nous l’avons déjà fait : l’entrepreneuriat peut et doit se conjuguer au féminin comme au masculin, sans aucune différence. »

La Frenchtech précurseure

Valérie Segretain note un axe de progression particulièrement important du côté de la FrenchTech, dont elle est l’une des ambassadrices avec sa société. « 10% seulement des entreprises de la FrenchTech sont gérés par des femmes. Un chiffre qui ne dépasse pas les 7% sur le territoire. (…) Malheureusement, les chiffres sont en baisse, notamment au niveau des choix des filières scientifiques et techniques par les jeunes filles », souligne la dirigeante. L’une de ses missions consiste donc à fédérer et donner beaucoup de visibilité à ces actrices de la FrenchTech. Cela passe entre autres par des actions en milieu scolaire.

Soulignant les bienfaits d’un spot publicitaire diffusé par la Caisse d’Epargne sur des femmes qui entreprennent, Valérie Segretain appuie sur le fait « de donner pour modèle des femmes qui ne sont pas des icônes » sur papier glacé auxquelles personne ne peut s’identifier. À ses yeux, il faut médiatiser « des femmes qui ont osé et qui nous montrent que c’est possible, que créer une entreprise s’inscrit dans un projet familial notamment. (…) Je l’ai fait ; je ne pense pas être extraordinaire, donc vous pouvez vous aussi le faire ! »

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