Vendée Globe

Vendée Globe

Publié le 3 février 2021

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Les premiers concurrents sont arrivés aux Sables d’Olonne, les derniers arriveront dans un mois et pourtant chacune d’entre elles et chacun d’entre eux seront fêtés comme s’ils avaient gagné. Parce que cette course, l’épreuve sportive sans doute la plus éprouvante que l’on puisse imaginer, est plus qu’une course pour désigner un vainqueur, une somme d’aventures humaines dont les enseignements pourraient bien servir de guide pour chacun d’entre nous et pour une saine Vision de la Gouvernance. VG, Vendée Globe, Vision de la Gouvernance ?

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Et d’abord la mission

Elle est on ne peut plus simple. Partir du port, faire le tour de la Terre et revenir. Bien orgueilleux celle ou celui qui afficherait que sa mission est de gagner. D’ailleurs, deux des favoris ont d’entrée de jeu été mis hors course pour ce challenge et ont dû refaire la route du chenal en sens inverse avant de repartir. Vous repartez alors que vous n’avez plus aucune chance de gagner ? Et oui, car que penserait l’équipe qui a travaillé jour et nuit depuis quatre ans pour mettre au point mon bateau si je restais amarré au ponton ? Que je les ai trahis sans doute et surtout qu’ils seront privés de faire avec moi ce tour du monde qui va les garder éveillés eux aussi pendant quatre-vingt jours ?

Alors j’appareille.

Mieux encore, je m’appelle Samantha et mes voiles vont arborer pendant des mois cet « Initiatives cœur » au service des enfants. C’est vrai je fais partie des favorites et pourtant dans cet océan immense mon bateau va heurter un objet non identifié. Je ne peux plus continuer, il faut rallier le port le plus proche pour me mettre en sécurité et réparer. Mais comme c’est une épreuve sans assistance, me voilà hors course. Et pourtant je repars. Les enfants que j’accompagne ont besoin que mes voiles continuent de porter leur message… Et de cela, on se souviendra peut-être plus que de mon statut initial de favorite.

La mission, la mission, ma vision de ce pour quoi je suis là. En toute humilité et en toute responsabilité.

Ensuite le bateau

Il faut que le bateau soit fort sinon il ne comprendrait pas qu’on l’emmène dans ces quarantièmes hurlants, cette ceinture de vents qui fait le tour de la Terre et où « il n’y a plus de loi », pire dans les cinquantièmes rugissants là où « il n’y a plus Dieu ». Sa coque, son mât et se voiles vont hurler pendant trois mois et, si je ne sais pas réduire la toile malgré mon immense fatigue, si je ne sais pas monter au mât pour remettre dans l’axe un appendice ridicule par sa taille mais capital par sa mission, si je ne sais pas ralentir quelques heures pour réparer, alors c’est que je ne sais pas en prendre soin.

Et de quoi m’étonnerais-je s’il refuse alors d’être mon seul et mon meilleur compagnon ? J’aurais beau le boxer il ne pourra mettre sa force au service de la mission que si j’ai moi-même mis mon intelligence à son service. Sa force et mon intelligence, sa puissance et mon courage. Et à la fin lorsque le chenal sera en vue, certains s’étonneront que je l’embrasse !

Alors bateau jeune et brillant ou bateau ancien et moins élaboré, peu importe pourvu que nous fassions corps, que nous nous respections et que ni lui ni moi ne rejette sur l’autre la responsabilité de nos faiblesses.

Et puis l’équipage …

L’équipage est bien réduit. Une femme ou un homme. Seule ? Seul ? Oui et non. Le skipper est d’abord riche de toute l’expérience qu’il a accumulée, de son histoire personnelle, des qualités qu’il a su éprouvées, des plus anciens qu’il a écoutés, de ces cartes météo sur lesquelles il a tenté non pas de comprendre pourquoi mais comment. Comment puis-je profiter au mieux de cet environnement auquel je ne peux rien imposer mais qui m’offre sûrement des opportunités auxquelles je n’aurais pas pensé.

Et puis il y a mon équipe. Elle est restée à terre mais elle tellement proche de moi… Une équipe d’experts, en architecture navale, en matériaux, en électronique et même en assistance psychologique. A la fin c’est moi qui décide mais sans eux je ne serais rien. Et chance aujourd’hui inouïe, je n’ai pas à entendre les commentaires de ceux qui ne sont responsables de rien mais sachant de tout et qui, loin de m’éclairer, brouilleraient mes cartes !

Et enfin il y a moi … ou plutôt nous

Pas moi parce que j’ai gagné la course. Moi parce que j’ai fait le tour du monde et que ce tour du monde m’a révélé ce monde et mieux m’a révélé moi et donc nous. Et parce qu’il m’a dit beaucoup de choses dont une qui me semble capitale : « relever la tête ».

D’ailleurs après avoir franchi le cap Horn, Pip Hare le déclare joliment.
« J’ai constaté que dans n’importe quelle situation à bord, qu’il s’agisse d’une tempête, d’une fuite ou du remplacement d’un safran, on perd rapidement la vue d’ensemble. Je suppose qu’il faut avoir la tête dans les détails pour gérer une crise, mais il est important de ne pas oublier de prendre de la hauteur lorsque vous relevez la tête à nouveau. Les tempêtes passent, le temps change, les problèmes sont gérés.

Ensuite, il faut passer à autre chose. Il y a encore tellement de choses qui m’attendent dans cette course, et peu importe à quel point une situation semble difficile sur le moment. Je m’efforce de regarder au-delà. Il y a moins de deux ans, je naviguais en IMOCA pour la toute première fois. Maintenant j’ai 5 500 milles devant moi pour terminer mon Vendée Globe. Les raisons de me battre et de me réjouir sont nombreuses ».

Par François Dupont, membre de Synopia 

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