Emploi : pour recruter les meilleurs talents, oubliez le CV

Emploi : pour recruter les meilleurs talents, oubliez le CV

Publié le 22 mars 2023

Chaque année, la France voit entrer 40 000 nouveaux ingénieurs sur le marché du travail. Malgré cela, le marché français de l’ingénierie est en tension, et les experts estiment qu’il manque environ 20 000 ingénieurs chaque année pour couvrir les besoins de l’industrie, tous secteurs confondus. Dans ce contexte de plein emploi, les enjeux de recrutement sont plus que jamais stratégiques pour les industriels, pour qui la réalisation des projets technologiques les plus complexes et les plus innovants repose en partie sur leur capacité à mobiliser les équipes d’ingénierie nécessaires.

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De quoi nous amener, nous, recruteurs, à réinventer nos méthodes de travail, pour mieux attirer les talents et s’ouvrir à de nouveaux profils. Intelligence Artificielle, gamification, speed dating, réseaux sociaux … les initiatives pour dépoussiérer les processus de recrutement se multiplient. Avec une tendance de fond : le Curriculum Vitae ne fait plus le job ! « Si les compétences ne sont pas disponibles sur le marché, ce n’est pas un CV qui va m’aider à recruter »

Premier élément à prendre en compte pour faire face à la tension du marché : je ne peux pas inventer des profils qui n’existent pas ou ne sont pas disponibles. Je dois donc les créer, c’est-à-dire recruter des personnes qui ont du potentiel, qui seront formées et accompagnées dans leur montée en compétences, plutôt que tout miser sur des profils dont les compétences ont déjà été validées.

D’autant plus que, sur le terrain, le « profil idéal » n’existe jamais vraiment. Chaque projet industriel a ses spécificités, chaque entreprise a ses process et ses outils, et ça n’est pas parce qu’un ingénieur a déjà participé à un projet de R&D dans l’automobile, que son expérience sera 100% duplicable chez un autre constructeur. Ainsi, plutôt que de passer 6 mois à chercher un mouton à 5 pattes, autant former à 100% un potentiel en devenir, et regarder non pas ce qu’un candidat a déjà fait, mais plutôt ce qu’il serait capable de faire à l’avenir.

A titre d’exemple chez agap2, 45% de nos recrutements en 2022 étaient des profils juniors avec moins 5 ans d’expérience. Et nous arrivons à leur proposer des postes à responsabilité, sur des projets technologiques engageants, et sur lesquels ils vont pouvoir monter rapidement en compétences.
Ce fut d’ailleurs mon cas, lors de mon arrivée chez agap2 en 2016, en stage en tant que Chargé de recrutement. Grâce à un accompagnement personnalisé, doublé de la confiance et de l’autonomie que m’ont accordé mes managers, je pilote aujourd’hui, 6 ans plus tard, l’ensemble des services RH au niveau national pour un périmètre de 2 500 salariés.

« Nous cherchons aujourd’hui des personnalités, et ce n’est pas quelque chose qui se lit sur un CV »
Le monde du travail évolue, et le monde industriel avec lui. Nous n’avons plus aujourd’hui besoin des meilleurs experts dans leur domaine, mais bien plus des meilleurs équipiers au service d’un projet. Et pour cela, un recruteur s’attarde davantage sur les « soft skills » que sur les expertises.
Un processus de recrutement doit donc également servir à valider les capacités relationnelles du candidat, pour garantir son intégration dans une dynamique collective. Et pour cela, le CV n’est d’aucune utilité. Ou à la rigueur, s’il est fait sous format vidéo, et qu’il raconte l’histoire du candidat, plutôt que de le réduire à un catalogue de compétences.

Pour détecter le talent d’un candidat, certains recruteurs s’appuient sur des tests de personnalités, MBTI ou autres. Je leur préfère pour ma part des échanges de visu autour de mises en situation, parfois éloignées du cadre professionnel mais souvent très révélateurs de personnalité et d’aptitude à manager, innover, … Par exemple, je propose au candidat de me dire tout ce qu’il ferait en une journée s’il avait un budget illimité, valable uniquement pour la journée, et dont il ne pourrait aucunement tirer un profit personnel. Les réponses peuvent être très variées, parfois inattendues, mais elles révèlent toujours des aspects insoupçonnés à la simple lecture d’un CV. « En situation de pénurie, les rôles s’inversent, et s’il y a un CV à faire, c’est plutôt celui de l’employeur »

C’est bien connu, un marché au plein emploi modifie les rapports de force, et la loi de l’offre et de la demande devient alors plus favorable au candidat. Les jeunes ingénieurs ont aujourd’hui le choix, et ils ne se privent pas, à raison, de mettre en concurrence les offres et les employeurs. Une situation qui implique de revoir les modalités de rencontre entre employeur et candidat, pour mettre en place des processus plus ouverts, permettant au candidat d’en savoir beaucoup plus sur l’entreprise, afin de faire un choix éclairé.

Et là encore, pas besoin de CV. Nous préférons chez agap2 des entretiens moins formels, basés sur une discussion d’égal à égal entre le recruteur et le candidat, voire disruptifs, comme l’entretien « ping-pong » où chacune des parties pose une question à l’autre à tour de rôle, ou l’entretien inversé, durant lequel c’est le candidat qui mène l’échange, en posant au recruteur toutes les questions qu’il souhaite.
En bref, le CV ne sert aujourd’hui plus à grand-chose d’autre qu’à fournir des coordonnées, comme une simple carte de visite. Et pour cause : un recrutement n’est pas une check-list, mais une rencontre humaine.

Par Rémi Minvielle, Responsable RH agap2 France

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