La flambée des prix de l’énergie doit inciter les Etats à passer aux énergies vertes

La flambée des prix de l’énergie doit inciter les Etats à passer aux énergies vertes

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La reprise de l’économie mondiale met en tension les stocks de gaz et de pétrole. Ainsi les ménages et les entreprises connaissent une flambée des prix de l’électricité et du carburant. Une situation prévisible, alimentée par des facteurs géopolitiques, qui doit pousser les Etats à s’orienter vers d’autres sources d’énergies selon Francis Perrin, directeur de recherche à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS).

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« La flambée des cours de l’énergie était attendue mais peut être pas de façon aussi spectaculaire » confie Francis Perrin, chercheur à l’IRIS. « Attendue », tout d’abord parce que la reprise économique s’est enclenchée « de manière quasi simultanée à travers le monde ». Ainsi les pays se remettent à consommer massivement les ressources d’énergies pour « relancer leurs industries et leurs entreprises ». Un rythme effréné, qui vise à « rattraper les pertes de croissance » liées à la pandémie de Covid-19 en 2020, explique Francis Perrin.

Autre phénomène engendrant une flambée des prix : « l’offre en énergie ne redémarre pas aussi fortement que la demande ». Une situation qui, néanmoins, reste « classique et habituelle » dans ce cas de conjoncture économique. D’autant que « les stocks mondiaux de pétrole et de gaz sont bas » et ne permettent pas d’irriguer les marchés. Le caractère « surprenant » de la hausse des tarifs en énergie réside, selon le chercheur de l’IRIS, dans la « sous-estimation du décalage entre l’offre et la demande ».

Des facteurs géopolitiques responsables de la flambée des prix

La crise de l’énergie est aussi accentuée par des « facteurs géopolitiques » affirme Francis Perrin. Premièrement les négociations au sein de l’OPEP+. Cette organisation réunit les pays exportateurs de pétrole, qui « dépendent économiquement de cette ressource ». En 2020, ces Etats ont « volontairement limité l’offre en pétrole » pour faire « remonter le prix du baril ». Par conséquent, les prix du pétrole augmentent « depuis novembre 2020 » rappelle le directeur de recherche. Même si les pays de l’OPEP+ alimentent le marché avec « 400.000 barils supplémentaires chaque mois depuis août 2021 », leur production pétrolière reste très inférieure par rapport à avril 2020.

« Les européens toujours dépendants des énergies fossiles »

En ce qui concerne maintenant les ressources en gaz, là aussi des enjeux géopolitiques sont à l’œuvre. La Russie, premier exportateur de gaz au monde, a « délibérément choisi de ne pas ouvrir davantage les vannes ». Le pays pourrait « produire plus de gaz mais se contente de respecter simplement ses obligations contractuelles vis à vis de ses clients en l’Europe » souligne Francis Perrin. Le choix de la Russie s’expliquerait, d’après le chercheur de l’IRIS, par le fait que Moscou « chercherait à montrer aux européens qu’ils restent dépendants des énergies fossiles et notamment du gaz russe ». Se serait un moyen pour les russes de « laisser l’Union Européenne mariner dans ses propres contradictions, alors que les 27 ont récemment affiché leur volonté de se diversifier vers des énergies renouvelables ».

Enfin, la crise des énergies conduit certains Etats à modifier leur politique en matière d’exploitation de ressource. Par exemple, « face à la pénurie d’électricité, la Chine a rouvert certaines mines de charbon » explique Francis Perrin. Et ce, au détriment des objectifs de réduction d’émissions de carbone. Même si cette situation reste marginale dans le monde, elle n’est toutefois pas étonnante. En effet, selon l’Agence Internationale de l’Energie, le charbon est, comme le nucléaire, peu impacté par la crise actuelle. Les stocks de cette ressource sont abondants et les prix restent stables. Ainsi Pékin y voit une alternative pour éviter les coupures de courant et relancer sa production industrielle.

« L’Etat aide les ménages plutôt que les entreprises car les entreprises ne votent pas lors des élections »

Concernant la France, la gestion de la flambée des prix est « influencée par la tenue de l’élection présidentielle en 2022 » d’après Francis Perrin. Alors que la crise de l’énergie fait grimper les prix de l’électricité, du gaz et du carburant, l’exécutif applique plusieurs mesures « pour éviter une vague de protestation type gilets jaunes comme en 2019 ». D’où l’instauration d’une « indemnité inflation » de 100 euros. Cette dernière concerne les chômeurs, retraités, étudiants ou salariés gagnants moins de 2.000 euros net par mois. Autre mesure, les autorités publiques prévoient de geler les tarifs règlementés du gaz jusqu’en juin 2022. En contrepartie elles s’engagent à dédommager les fournisseurs d’électricité.

Cependant les organisations d’entrepreneurs ont récemment alerté le gouvernement sur l’effet de la montée des prix de l’énergie pour les entreprises. Elles ont appelé l’Etat à faire un geste envers les sociétés dont l’activité dépend des ressources en énergie. Toutefois, « la priorité n’est pas là pour l’exécutif » souligne Francis Perrin. Le chercheur rappelle que même si « le tissu des TPE et PME est particulièrement fragilisé » par la crise, « ce sont les ménages et pas les entreprises qui voteront lors de l’élection présidentielle ».

« Il ne faut pas casser la hausse des prix mais en tirer des conclusions »

Le directeur de recherche à l’IRIS estime néanmoins qu’il est nécessaire de ne pas « freiner la relance de l’économie » liée à la reprise de la consommation des ménages. En outre, Francis Perrin salue la revalorisation du chèque énergie. Mais il se montre tout de même plus septique vis-à-vis du gel des tarifs du gaz. Pour lui, « il ne faut pas casser ou étouffer la hausse des prix de l’énergie ». Cette dernière est « un indicateur qui envoie des signaux » sur la consommation en énergie des sociétés. Les prix qui grimpent doivent « inciter les investisseurs et les dirigeants à s’orienter vers des énergies renouvelables ». Francis Perrin affirme qu’une « mutation vers des énergies vertes permettrait de limiter, à l’avenir, l’impact d’une telle crise ». Les Etats doivent donc « tirer les conclusions » des problèmes financiers engendrés par la dépendance aux énergies fossiles.

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