Avouons-le, dans notre imaginaire collectif la mafia est un monde d’hommes, avec ses codes, ses univers. Vous dîtes « famille » et vous pensez Brando, Pacino, Scorcese. Les scenarii et les décors sont déjà posés, et dans ce cadre, et seulement dans ce cadre, on crée une histoire nouvelle. Avec La Famille publié aux éditions Gallimard, Naomi Krupitsky casse (un peu) les codes. Un roman de mafieux oui, mais vu côté femmes.
Alors l’histoire :
Au cœur des années 1930, de nombreuses familles italiennes ont émigré dans le quartier de Red Hook, à Brooklyn. C’est là que vivent les petites Sofia et Antonia, adorables voisines et amies absolues. Et si elles sont aussi proches, c’est qu’elles ont un point commun singulier : leurs pères font partie de la mafia. Or, en regardant chaque jour leurs mères subir une vie faite d’inquiétude, les fillettes se jurent de ne jamais épouser d’hommes œuvrant pour la Famille.
Quand il arrive malheur au père d’Antonia, le fil de son amitié avec Sofia se fragilise, d’autant que leurs rêves se mettent à diverger : l’une voudrait faire des études quand l’autre préfère les frivolités. Mais quels chemins prendront les deux amies lorsqu’une fois adultes elles devront vraiment choisir qui devenir, et qui aimer ?
C’est donc un livre déroutant, où finalement le décors habituel du genre est en arrière fond. La mafia est présente à chaque page, pas de doutes, mais perçue différemment. Entre la famille comme organisation et la famille comme additions de destins, Naomi Krupitsky fait le choix de l’intime. Un intime finalement bien plus révélateur, bien plus lourd de sens, bien plus édifiant. Sofia et Antonia sont les témoins d’un monde en mutation. L’ancien monde, hérité de la prohibition, et le monde nouveau, celui d’après guerre.
Mais, si le monde change, la Famille reste, comme une malédiction.
